Quand tu te choppes une maladie comme un cancer, il se passe une chose très désagréable: tu te trouves projeté dans le monde des gens qui n'ont pas de chance.
Je ne vous parle pas des gens qui sont tout le temps en train de se plaindre du moindre souci de leur vie, comme du métro qui est encore en retard par exemple,
vous connaissez d'ailleurs mon opinion à ce sujet.
Non, je vous parle des gens qui n'ont vraiment pas de chance. Des gens qui se rendent tout à coup compte que non, cela n'arrive pas qu'aux autres, que non, après-demain ne sera pas forcément meilleur si on se sort les doigts.
Pour moi cela a évidement commencé avec l'annonce de ma maladie.
Les premiers jours, les médecins ne savaient pas quel type de leucémie j'avais et me disaient qu'il y avait 20% de chances que j'ai le fameux "chromosome de Philadelphie" qui complique sérieusement le traitement et le pronostic.
Quand tu es habitué à une vie de chance, tu te dis, "20% c'est que dalle, no soucy". Avec quand même une petite voie dans la tête qui te murmure "Oui, mais tu avais une chance sur dix mille de te chopper une leucémie, donc on va continuer à serrer (pardon, croiser) tout ce qu'on peut serrer, ok?".
Et ça ne loupe pas, tu as le chromosome de Philadelphie et tu comprends que non, tout ne se passera pas forcément bien même si on l'espère assez fort, finalement. Et puis la vie continue, les emmerdes s'accumulent (les assureurs sont définitivement des vampires, croyez-moi), et tu te dis, "c'est bon, le bout du tunnel, je suis pas près de le voir sans lumière blanche". Pardonnez le jeu de mot macabre.
Et c'est le premier piège de ces foutues maladies: te faire perdre l'espoir en te faisant croire que tu es un crasseux. Car tout le monde le dit, moi le premier: le moral, c'est 50% de la bataille.
Alors même si tu as l'impression d'être un sale poissard, il faut garder un moral d'acier, et le miracle, c'est que si tu tiens suffisamment longtemps, l'univers fini par te lâcher les baskets. C'est comme s'il te disait, "c'est bon mon pote, sors du ring, je fais monter quelqu'un d'autre".
Hier l'univers à fini par me lâcher miennes, de baskets, in style. Et croyez moi, de la bonne nouvelle, dessous, il y en a un paquet.
- J'ai reçu mon renouvellement d'autorisation de travailler, vous expliquer pourquoi c'est cool c'est un peu compliqué, mais retenez juste que en gros ça veut dire que je continue d’être soigné et de recevoir un peu de sous
- Celia a eu son permis de conduire haut la main (96/100, comme moi il y a deux ans)
- Qwest a réparé ma connexion internet et j'ai maintenant une vitesse correcte, croyez moi quand vous passez une heure sur Skype par jour, c'est de la putain de bonne nouvelle
- Et le meilleur pour la fin: on m'a trouvé un donneur de moelle parfait, un match 10/10! Ce qui était loin d'être gagné car j'ai apparemment un type HLA rare.
Rendez-vous compte: il y avait une chance sur 12 millions que j'ai un jumeau génétique quelque part. Et j'en ai un.
On dirait que les affaires reprennent :).