Motif? Cela fait un an que je suis en arrêt maladie.
Si vous êtes une personne normalement constituée, j'imagine que cela vous choque. Même des américains, pourtant habitués à vivre dans un contexte où l'on peut être licencié du jour au lendemain, voir d'une minute à l'autre ont étés interlocutés (bonne chance, Google Translate) lorsque je leur ai annoncé ça.
Et pourtant, je suis plutôt satisfait de mon sort. J'ai survécu suffisamment longtemps pour me faire virer, ce qui n'était pas gagné en Mars 2011. C'est comme qui dirait un problème de riche! Et puis j'ai en fait été plutôt bien traité par ma boite, car la durée minimale que doit respecter un employeur avant de vous licencier suite à une absence pour maladie (...ou pour grossesse) est de 12 semaines, chose que presque personne aux U.S ne sait. D'ailleurs, vous, connaissez vous la loi française dans ce domaine? Je me suis aperçu en me posant la question qu'en fait je n'en avait aucune idée, et après recherche, la réponse est assez surprenante.
Aux US donc, passé 12 semaines c'est entièrement à l'appréciation de l'employeur. En règle générale, plus la compagnie est grosse, meilleurs sont les "benefits" (l'enveloppe assurances, vacances, maternité...). On n'a pas la même quantité de vacances et la même assurance santé chez Google et Microsoft que dans une petite boite de 50 employés. Les disparités peuvent être assez énormes, contrairement à la France où tout oscille autour de ce qu'autorise la loi. Bon, ok chez Orange il y a 5 semaines de vacances plus 2 de RTT, mais aux US ça peut varier du simple au quadruple.
Je n'ai donc vraiment pas de quoi me plaindre, même si sur le moment, ça a été dur à avaler. J'ai un peu eu l'impression de me faire larguer par une girlfriend car j'adorais ma boite, mon boulot et mon équipe. Le plus frustrant dans toute l'histoire, c'est que j'étais extrêmement bien noté, que mon équipe galère depuis un an a recruter des éléments de qualité pour faire face à la charge et que de me garder comme employé ne coutait en fait pas grand chose à la boite... Car ce n'est pas elle qui me paie pendant mon invalidité, mais une assurance privée, à laquelle j'ai souscrit.
Petit calcul, ma boite payait donc environ 400$ d'assurances par mois en me gardant comme employé (la part de l'employeur) et... c'est tout. Un coût de 5000$ par an, grosso modo. Sachant que recruter une personne, cela coute au minimum 10000$ (et surement beaucoup plus) et que mon équipe est chroniquement en déficit de personnel, mon licenciement n'a aucun sens, économiquement parlant... Mais c'est la contrepartie des avantages d'une grande boite: la règle n'est pas négociable. Plus que de me faire licencier, c'est cela que j'ai eu du mal à accepter en fait, cette règle inflexible qui dans mon cas n'a pas beaucoup de sens économiquement. Passons.
"Mais", vous allez me dire, "tu n'es plus en traitement, tu es à priori guéri, pourquoi ne pas avoir repris?".
Bonne question, que je me suis posé extrêmement sérieusement. Je peux parfaitement comprendre qu'après ce genre d'épreuve, on n'ai pas forcément envie de retravailler, mais j'ai toujours adoré mon boulot, j'aurais pu bosser de chez moi, alors pourquoi pas?Sauf que ce n'était pas une question de savoir si j'en avait envie, mais de savoir si c'était possible.
Et pour le savoir, un seul moyen: tester. Prendre un rythme à peu près normal, avoir une activité normale toute la journée, faire un travail intellectuel demandant une attention soutenue sur une longue période, bref sortir du mode convalescent et essayer de passer en mode travailleur.
Croyez moi, j'ai essayé. Le résultat n'est pas beau à voir. Quand j'ai testé en février, j'étais une loque le soir, et non seulement le soir, mais plusieurs jours d'affilée. J'ai réessayé en Mars, même résultat. Le week-end dernier, j'étais en "super forme" du coup nous avons eu un week-end relativement actif... Et cela fait 4 jours que je le paye et que je suis décomposé.
Il faut vraiment comprendre qu'à ce niveau, la transplantation ça ne rigole pas. Cela n'est pas visible, mais en terme de dommage cellulaire, c'est comme si je m'étais pris un bus dans la figure... Et se reconstruire prend un temps fou, d'autant plus quand on ajoute les phénomènes de rejet et les effets secondaires des médicaments.
Bref, j'ai testé, ce n'est pas possible. On verra vers Aout/Septembre, et encore, j'ai comme un doute.
(à suivre)
PS. A lire certains commentaires, j'ai l'impression que je chouine dans ce post: c'est loin d'être le cas.
1. J'ai été bien traité par rapport à ce que la loi exige, (par contre, voudrais-je les mêmes lois pour la France? Bien sur que non, voir plus bas)
2. De toute façon, je ne peux pas bosser, c'est clair et net. Donc pas de quoi pleurer.
3. A Seattle, on est en manque d'ingénieurs, et je reçoit régulièrement des propositions d'entretien. Je ne suis donc pas spécialement inquiet.
Lisez mon commentaire et celui du Piou, juste en dessous; qui précisent bien ma pensée.