Carnets de Seattle: Patchwork d'impressions et d'humeurs de deux Français expatriés aux Etats-Unis. Depuis mars 2011, ces carnets sont aussi le journal de notre combat contre la leucémie.

dimanche 29 décembre 2013

Hernie Discale

Le problème quand ça fait longtemps qu’on se traine une pathologie lourde, c’est qu’au bout d’un moment les gens autour de vous en ont assez de vous voir constamment malade, et petit à petit, vous cessez d’être le centre du monde.

Comme d’être le centre du monde, c’est quand même plutôt cool, je me demandais depuis un moment qu’est ce que je pouvais imaginer pour me renouveler un peu et tirer une larmichette à madame Michu. Il me fallait un truc bien pénible et bien douloureux, qui suscite bien la commisération de mes congénères, tout en me permettant de continuer à pratiquer mes trois occupations préférées : écrire, jouer de la guitare et jouer à l’ordinateur.

J’ai testé pendant un moment le fait de vomir pendant la nuit, mais c’est un truc éculé, tous les enfants du monde vomissent tout le temps, un vieux schnoque de 34 piges qui passe ses nuits à vomir, ça ne fait pas pleurer dans les chaumières.

C’est là que j’ai eu une idée : et si je me faisais une petite hernie discale ? C’est super douloureux, certaines positions sont insupportables, mais normalement, couché, cela ne fait pas mal, la pathologie parfaite pour moi ! En plus, en me débrouillant bien j’allais peut-être pouvoir m’arranger pour faire ma crise aiguë le jour de Noël, histoire de rendre toute l’histoire encore plus poignante.

À peine le plan imaginé que j’ai commencé à le mettre à exécution. Il y a deux semaines, j’ai commencé par avoir mal dans la fesse, une espèce de vague crampe, désagréable, mais pas suffisamment gênante pour être inquiétante. Puis, j’ai commencé à avoir extrêmement mal au dos : je suis donc allé chez mon chiropracteur, plusieurs fois. La dernière fois, elle m’a manipulé un peu violemment. Le lendemain, jour de Noël, je n’avais plus mal au dos, par contre la douleur dans ma fesse avait empiré de façon tout à fait satisfaisante pour la mise en place de mon plan : m’assoir plus de quelques minutes était absolument intolérable. Le soir du réveillon, pour nous rendre chez nos amis, j’ai dû m’allonger sur le dos sur la banquette arrière de la voiture. En mon for intérieur, je me suis autocongratulé : quelle image, que ce réveillon passé sur le dos ! Opération j’arrache des larmes aux portes de prison réussie !

Le lendemain, au réveil, j’ai commencé à avoir des fourmillements dans les orteils du pied gauche, à boiter et à avoir le mollet gauche douloureux. Ce sont des signes inquiétants faisant penser à une atteinte aux nerfs. Ah, je vous disais bien, j’ai bien choisi ma pathologie, elle est pleine de mots bien flippants !

Jeudi, comme les fourmillements avaient empiré jusqu’à me faire perdre une partie de la mobilité de mon pied et de ma jambe, nous nous sommes décidés à aller à l’hôpital, où j’ai passé une IRM et des radios (et accessoirement où nous avons passé 9 h aux urgences, de 17 h à 3 h du matin). Résultat des courses, sans surprise : hernie discale ! Et voilà, j’ai encore trouvé le moyen de me distinguer, youpi !

Normalement, pas besoin de chirurgie, on essaie juste de diminuer l’inflammation, donc le traitement c’est repos (youpi, je vais pouvoir jouer comme prévu) et anti-inflammatoires à haute dose. Et tenez-vous bien, c’est là qu’est le paradoxe ultime : si j’ai une hernie discale c’est à cause d’un vieillissement prématuré de ma colonne vertébrale causé par les stéroïdes. Donc pour guérir cette hernie, on me file des stéroïdes à plus haute dose. Normal, tout va bien madame la Marquise.

Bon, vous aurez bien compris que tout ceci n’était pas prévu au programme. Franchement, je suis plutôt soulagé, je m’attendais à pire, du genre fracture de vertèbre. Il n’empêche que tout d’abord, tout cet épisode m’a sérieusement claqué, surtout nerveusement d’ailleurs, je suis épuisé par la douleur et le stress. Mais surtout, cela remet beaucoup de choses en perspectives. J’hésitais à arrêter dasatinib, parce que ce médicament a peut-être un effet protecteur anti-leucémie... Mais je ne peux plus me cacher la tête dans le sable et ignorer les dommages que tous ces médicaments font à mon corps. Pour l’instant, c’est juste une hernie discale bégnine, mais qui va me garder au lit pendant une bonne semaine. La prochaine fois ça sera quoi ?

Il y a clairement un risque de rechute de la leucémie, mais l’on commence à arriver à un stade où il y a un risque de plus en plus sérieux à me garder sous autant de médicaments. Si cela continue, je garderai des séquelles à vie. Pour l’instant, la plupart de mes séquelles sont réversibles, il ne faut pas que je gâche cette chance. D’un autre côté, vous ne pouvez pas savoir ce que cela me fait peur de laisser ce filet de sécurité qu’est la dasatinib. C’est un plongeon dans l’inconnu, probablement pour le meilleur, mais je vous avoue que je suis terrifié.

Ah, au fait, Joyeux Noël à tous! Cet incident mis à part, nous avons passé un très bon Noël grâce à la prévenance de nos amis français à Seattle et nous avons pu parler longuement avec nos familles sur Skype, j'espère que vous tous avez aussi passé de très bonnes fêtes. 

lundi 23 décembre 2013

Maisons en pain d'épice, le retour

Pour rester dans l'ambiance des fêtes de faim d'année, hier nous sommes allés voir une exposition de maisons en pain d'épice :).

Je vous laisse regarder quelques photos ci-dessous, et vous retrouverez plus de photos sur la page Facebook.

Sinon, une petite anecdote pour rigoler: suite à mon dernier post, Celia nous a cuisiné un excellent pain d'épice (c'est quand même cool, de découvrir des talents cachés à sa femme après 5 ans de mariage). Pain d'épice que nous avons laissé traîner sur le comptoir de la cuisine.

Comme vous le savez peut-être, nous avons deux chats, qui ont à peu près tous les droits sauf 3: interdiction de rentrer dans notre chambre, interdiction de monter sur mon bureau, interdiction de monter sur les meubles de la cuisine. Cette dernière interdiction est la plus strictement appliquée, pour des raisons d'hygiène évidente, et depuis 4 ans que nous les avons, j'ai du les surprendre une ou deux fois maximum sur un meuble de la cuisine (ce qui se termine en grand verre d'eau dans la tronche, je vous assure que c'est pas subtil mais que cela a des vertus éducatives certaines, en tout cas avec des félins).

Bon et bien la semaine dernière, devinez qui j'ai retrouvé sur le plan de travail de la cuisine en train de boulotter des miettes de pain d'épice?

This girl!

ma loulou

gros calin

Et rien n'y a fait: chaque fois que j'ai laissé traîner un peu de pain d'épice, elle s'est jeté dessus comme une vorace, interdiction ou pas. C'est incroyable, elle est complètement dingue de pain d'épice au point de commettre la pire transgression possible dans notre maison, complètement sciemment et à répétition. C'est d'autant plus étrange que nous ne leur donnons jamais rien à manger d'autre que de la nourriture pour chat, et qu'elle n'a jamais éprouvé d'envies particulières pour de la nourriture humaine: on peut laisser traîner une salade au thon sans aucun problème, mais pas du pain d'épice. C'est assez bizarre. Bref.







mardi 17 décembre 2013

Une maison en pain d'épice

Bon faut pas croire qu'on fait qu'en chier ici à Seattle, on s'amuse même plutôt bien la plupart du temps.

Ma dernière trouvaille en date, c'est la maison en pain d'épice. Les maisons en pains d'épices, apparemment c'est une tradition de Noël, c'est un truc que l'on fait en famille ici à cette période de l'année. Cela faisait longtemps que je voulais en fabriquer une, je vous avais prévenu, je suis un grand enfant! Mais à chaque fois que j'essayais d'en acheter une en magasin, je m'opposais à un refus catégorique de Celia, qui est bien trop fière pour admettre que ça la fait tripper de faire des trucs purement américains. Alors j'en ai profité d'être en mission courses en solo chez Costco pour en acheter une en douce, ni vu ni connu, hop. Me suis fait copieusement engueuler une fois rentré à la maison, et une fois la diatribe terminé, je me suis retrouvé face à une Celia ravie et enchantée qui n'avait qu'une hâte: décorer sa maison. Ce que nous avons fait ce week-end, et voilà le résultat!


Bon, ça vaut ce que ça vaut, mais je vous assure que c'est plus costaud à faire que ça en à l'air, le "frosting", le sucre blanc qui sert de colle, ça coule, ça colle, c'est gluant, on s'en met partout bref c'est marrant comme tout. Et puis c'est notre maison et on en est fier, voilà! D'ailleurs c'est bien plus dur que ça en à l'air, j'aime mieux vous le dire!

Au final, je n'ai qu'une déception, c'est que malgré l’appellation "maison en pain d'épice", qui faisait que j'avais la ferme intention de me la boulotter tranquillos après l'avoir décoré, en fait ce n'est pas du bon pain d'épice, c'est un espèce de biscuit très dur pas très mangeable. Du coup, ça m'a donné des envies de pain d'épice Papy Brossard, mais je n'ai rien trouvé au supermarché du coin. A croire que c'est inconnu au bataillon. Si des expats savent où en trouver je suis preneur, c'est pas le genre de truc que je mange d'habitude, mais j'ai des envies de femme enceinte, comme qui dirait.

Bon en fait on me dit dans l'oreillette qui lit par dessus mon épaule "Mais moi je sais faire du pain d'épice"... Et ben file en cuisine ma cocotte!! Moi, macho? Normalement non, mais là, il s'agit de pain d'épice, faut pas plaisanter avec ça, et m'avoir caché ça pendant 5 ans de mariage, c'est gravissime, vous ne trouvez pas?



samedi 14 décembre 2013

A propos de la douleur et où l'on reparle de la sur-médication

Rappelez-vous, j'avais déjà parlé du fait qu'en ce moment, une majorité de mes problèmes vient du fait que je prends trop de médicaments, en particulier une TKI pour essayer de diminuer le risque de retour de la leucémie et que ceux-ci ont des effets secondaires pénibles. Malheureusement, certains de ces médicaments sont indispensables, et donc on est obligé de faire avec.

Pour vous donner une idée du genre de situation à marcher sur la tête dans laquelle on peut arriver, il faut que je vous raconte la dernière addition au répertoire.

À cause de l’interaction entre l'antirejet de greffe et la TKI anti-leucémie susmentionnée, je souffre constamment de douleurs chroniques aux articulations qui sont très pénibles, à tel point que le soir, je suis parfois obligé de me mettre de la glace sur les mains.


Comme je suis à des doses assez massives de morphine et que l'on ne peut pas continuer à augmenter éternellement, la spécialiste de la douleur de la clinique a décidé d'essayer une nouvelle approche. En gros, sa théorie, c'est que comme j'ai mal en continu depuis à peu près trois ans, mon cerveau est constamment stimulé et irrité. C'est un peu comme si mon thermostat de détection de la douleur était déréglé à la baisse, ou comme si la douleur était un liquide que l'on verse dans un vase: chez moi le vase est plein depuis longtemps et le vase déborde constamment.

Le but du jeu c'est donc d'essayer de réajuster le thermostat de mon cerveau à un niveau normal, et pour cela on utilise des petites doses de certains antidépresseurs, la Venlafaxine pour ceux qui connaissent.

Petit problème, le lendemain après la première prise, je me suis réveillé à 6h du matin, en proie à une crise d'anxiété pas possible. Le temps de détendre le bas de mon corps, c'était le haut de mon corps qui était tendu comme pas permis. Le temps de détendre le haut, le bas était à nouveau crispé, contracté... Comme ça en boucle pendant plusieurs heures, avec en plus un poids sur la poitrine, une oppression, comme si quelque chose d'horrible allait arriver, avec une difficulté à respirer tellement j'étais terrorisé. Le pire, c'est que comme cette peur est d'origine chimique et qu'elle n'a en fait aucun objet, il n'y a même pas moyen de rationaliser, d'essayer de méditer, ou quoi que ce soit... Il faut juste attendre.

Dans les jours qui ont suivi, mon comportement a continue à changer... Je n'ai pas fait de crise d'anxiété aussi grave, mais j'ai eu des répliques assez sévères. Alors j'ai commencé à prendre un anxiolytique, le lorazepam, pour me calmer un peu les nerfs. Sauf que le lorazepam interagit avec la morphine, et que cela me fatigue encore plus que je ne le suis d'habitude. Vendredi dernier, je me suis installé dans mon fauteuil pour écrire en milieu d'après-midi, je me suis endormi sur mon portable sans même m'en rendre compte. Celia m'a réveillé en me téléphonant deux heures plus tard, nous sommes allés faire les courses, ensuite j'ai redormi sur le canapé de 7h du soir à 10h, j'ai diné légèrement, je me suis recouché direct, et j'ai dormi jusqu'à midi le lendemain. Alors, peut-être que cela vous fait rêver de pouvoir dormir autant, mais je vous assure que ce n’est pas une vie, que de la passer endormi.

Et donc, le comble, c'est que depuis que je prends cette saloperie d'antidépresseur, je suis déprimé comme pas permis, anxieux comme ce n’est pas possible, terrifié par l'avenir, par si mon invalidité va être renouvelée, par comment on va subsister l'année prochaine, par la possibilité du retour de la maladie (chose qui d'habitude ne m'inquiète pas)... Je suis malheureux comme les pierres, alors que d'habitude je suis plutôt heureux de vivre, malgré la douleur. Ce qui m'agace le plus c'est que cela affecte mon écriture et comme j'écris énormément en ce moment, c'est vraiment pénible.

Seul point positif, il semble que le traitement commence à marcher: la douleur ne disparait pas, mais les extrêmes sont lissés et j'avais parfois des épisodes avec des douleurs très aiguës qui me forçaient à prendre plus de morphine que ma dose normalement allouée par jour (ce qui me laissait avec moins les jours suivants). Ces épisodes sont plus rares. Aussi, ces effets secondaires sont apparemment temporaires et normalement ils disparaissent au bout de quelques semaines... Bref, il faut s'accrocher, en baver pendant quelques semaines avant que cela aille mieux.

Enfin, rendez-vous compte du paradoxe:

Dsatinib me donne des douleurs -> Morphine
Morphine pas suffisante -> Venlafaxine
Venlafaxine déclenche des crises d'anxiété -> Lorazepam
Le Lorazepam me rend quasi narcoleptique -> On me propose de l'Adderall (en gros, des amphétamines). J'ai dit non, faut pas déconner.

L'un de mes médecins appelle ce problème, quand les effets secondaires dépassent les bénéfices, un syndrome de "poly-pharmacy". En gros, le seul moyen que j'aille mieux, c'est de supprimer dasatinib. C'est un gros pas à faire que pour l'instant je n'arrive pas à faire dans ma tête. Il faut que je prenne le temps d'y réfléchir.

Je voulais finir ce post par une triste nouvelle: un élève de l'école taoïste que je pratique, qui était depuis longtemps malade d'un cancer et avec qui j'avais longtemps échangé en avril dernier, nous a quitté hier. Toutes mes condoléances à sa famille et à ses proches, c'était quelqu'un d'intelligent, de curieux, qui lors de nos séminaires posait toujours des myriades de questions et qui m'avait beaucoup apporté pendant les brefs moments ou je l'ai connu. Repose en paix, l'ami.

lundi 9 décembre 2013

Leucémie: l'histoire du chromosome de Philadelphie.

Vous le savez peut-être, je collectionne les livres dédicacés ou rares, et je suis particulièrement fier de cette étagère de notre bibliothèque qui regroupe une partie de mes trésors.


Par conséquent, quand je vais dans une librairie, je me dirige en général dans les rayons réservés aux livres signés en plus de mes styles préférés, ce qui m’amène parfois à tomber sur des livres que je n’aurais pas découvert par ailleurs.

Il y a quelques semaines, je suis en l’occurrence tombé sur un exemplaire signé du livre "The Philadelphia Chromosome: a Mutant Gene and the Quest to Cure Cancer at the Genetic Level", en français: "Le chromosome de Philadelphie et la quête pour guérir le cancer au niveau génétique", de Jessica Wapner, une journaliste scientifique.

Je suis tombé en arrêt, car la leucémie qui m’a touché est justement.une leucémie aiguë lymphoblastique avec chromosome de Philadelphie.

le chromosome de Philadelphie, une mutation importante dans plusieurs leucémies

Alors, qu’est ce que c’est que ce fameux chromosome de Philadelphie?

En fait, cela désigne une translocation réciproque des bras des chromosomes 9 et 22. En français, cela veut dire que ces deux chromosomes ont muté et ont échangé des morceaux de leurs bras, comme si j’échangeais ma main gauche avec la main droite de mon voisin. Vous imaginez bien que cela ne fonctionne pas super bien.

C'est un peu plus compliqué que cela: tous les gènes présents sur les bras transloqués continuent de marcher correctement, même s'ils ne sont pas sur le bon chromosome, jusqu'ici, pas de surprise. Par contre, au point de jonction, il y a fusion de deux gènes, codant respectivement les protéines Bcr et Abl, d'où l'apparition d'un gène fusion, un onco-gène, qui code la protéine Bcr-Abl, d'où l'abus de langage où l'on parle souvent du gène Bcr-Abl, synonyme du chromosome de Philadelphie. Qu'est ce qui se passe exactement? Et bien Abl est une protéine qui est associé à une membrane, et ne nous intéresse pas vraiment. Bcr, en revanche, est une tyrosine kinase, et il se trouve que la protéine mutante résultante Bcr-Abl est aussi une tyrosine kinase. Sauf que normalement, l'activité des tyrosines kinases est régulée par d'autres protéines, mais que la mutante Bcr-Abl ne répond pas à ces régulations et est toujours activée, ce qui conduit à la dérégulation des divisions cellulaires.

Notons par ailleurs que ce gène très particuliers permet d'effectuer des tests très précis, de PCR quantitatives me souffle Celia, qui permettent de détecter une molécule d'ADN dans un sample donné, et de caractériser ainsi la maladie, mais aussi de suivre les patients et de suivre très finement pour voir s'il reste des cellules malades dans leur moelle osseuse ou dans leur sang.

C’est une mutation qui est caractéristique des leucémies chroniques, et qui arrive dans 20 à 30 % des leucémies aiguës lymphoblastiques. L’avantage de cette mutation c’est que cela rend la maladie traitable par des inhibiteurs de tyrosine kinase justement, qui vont réguler l'activité de Bcr-Abl (et c’est de la découverte de cette mutation et de cette classe de médicaments dont il est question dans le livre), l’inconvénient, c’est que dans le cas des leucémies aiguës, cela les rend beaucoup plus agressives et beaucoup plus prônes à rechuter, d’où la nécessité absolue d’une greffe allogénique. Il y a 30 ans, cette mutation, c’était une sentence de mort, plus moins, puis les greffes de moelles sont arrivées et maintenant le pronostic s’améliore chaque année grâce au progrès de la technique de greffe et aux nouvelles TKI qui sortent régulièrement.

Vous savez, lors de mon diagnostic, c’était un moment terrible... Au début, on savait que j’avais une leucémie, mais pas de quel type. Le médecin vous dit, "On attend la cytologie, si vous êtes Ph+ négatif, la chance de survie à 5 ans c’est 70 %, sinon, c’est 40 %..." Quelques jours plus tard, le résultat arrive, et paf, dans le c*l Lulu, t'es Ph+... C’est comme d’apprendre une deuxième fois que tu as un cancer... Heureusement ce jour-là, coïncidence incroyable, j’avais la visite d’un ami de ma femme qui a eu une ALL Ph+ juste comme moi. Il était dans la chambre lors de l’annonce du médecin (j’avais autorisé tout le monde à rester), et il m’a regardé, en me disant : "Regarde, moi aussi, j’étais Ph+ et 10 ans plus tard, je suis debout face à toi". Vous ne pouvez pas savoir ce que je suis reconnaissant de ce hasard incroyable du destin qui m’a permis d’y croire et de ne pas perdre espoir.

Bref, j’ai acheté ce livre, qui raconte en détail l’histoire de la découverte de cette mutation si particulière qui a ouvert le champ à une nouvelle catégorie de thérapie, les thérapies ciblées, dites géniques...

Et je n’arrive pas à le lire.

Un soir, dans mon lit, je l’ai pris, j’ai essayé de l’ouvrir, impossible. C’est comme s’il y avait quelque chose de noir et de néfaste à l’intérieur de ce livre. Oh, je suis conscient que c’est dans ma tête, hein... Mais pour moi, c’est comme si je lisais le journal intime de mon violeur ou de la personne qui a essayé de me tuer. Dans ces pages, il y a forcément l’histoire de gens qui sont morts, tués par la même maladie que moi, qui n’ont pas eu la chance de bénéficier des traitements modernes. C’est aussi l’histoire des héros des premiers protocoles de recherche, qui ont donné leur vie pour que des gens comme moi puissent vivre. Je suis sûr que c’est passionnant, c’est le genre de sujet qui m’intéresse, vous imaginez bien... Mais c’est tellement chargé émotionnellement pour moi, que je ne sais pas si j’arriverais un jour à le lire. On verra.

vendredi 6 décembre 2013

Ou l'on reparle de préparation

Si vous me suivez depuis un moment, vous savez que je suis avec intérêt le blog de VolWest, qui traite du "survivalisme", qui est un mot que je n'aime pas beaucoup, car il est trop vague et connoté. En gros, il s'agit de la préparation à des scénarios de catastrophes de degrés variés: VolWest parle d’événement "vert" (moins de 72 heures), "jaune", "orange", "rouge" (effondrement total de la civilisation).

Quand on dit que l'on est survivaliste, ou "prepper", comme on dit aux US, on est souvent un peu pris pour des tarés paranoïaques, et il faut bien dire que l'on n’est pas aidé par toute une frange du mouvement qui sont des espèces de guerriers du dimanche qui se préparent à une invasion de zombies en stockant des années de bouffe et des tonnes d'armes et de munition. C'est très dommageable, il y a beaucoup de survivalistes qui sont des gens comme moi, qui sont simplement prévoyants, intéressés par les concepts de résilience, par une forme d'indépendance face au système, par l'écologie aussi.

C'est à chacun de définir ses besoins en terme de préparation, et d'envisager les risques éventuels auxquels vous pouvez être confronté. Pour vous donner une idée du type de réflexion que l'on peut avoir, je vais vous expliquer en gros mon analyse de mes risques personnels.

Premièrement, une chose dont les survivalistes ne parlent à mon avis pas assez, c'est la "survie" au sein du système. Dans notre monde actuel, le risque le plus important, ce n'est pas l'effondrement de la société et la famine, comme certains paranos peuvent nous le faire croire, mais c'est la perte d'un emploi, ou un accident, une hospitalisation, ou celle d'un proche. La première chose à faire c'est de s'assurer d'avoir tous les filets de sécurité nécessaire au sein du "système". Pour la petite histoire, lorsque j'ai changé de boulot ici à Seattle, j'ai eu à choisir si je voulais prendre une assurance complémentaire santé en plus de mon assurance principale... Je me suis posé la question, en me disant, "A 30 ans, quel est le risque que j'aie un accident grave?"... Et puis finalement j'ai décidé qu'il serait stupide d'essayer d'économiser 10$ par mois sur un truc pareil... Pas besoin  de vous faire un dessin: si je ne l'avais pas fait, à l'heure actuelle, je serais sacrément dans le caca. Donc, avoir les assurances qui vont bien, avoir une réserve d'argent (ie, ne pas vivre à crédit, comme beaucoup de gens le font ici...) ...

Une fois ceci fait, pour moi, il faut s'intéresser au risque d'accidents de la vie: il est pour moi impératif de faire une formation aux premiers soins, et d'avoir en permanence sur soi une mini trousse de premiers secours. Je ne compte plus les fois où la petite pochette que j'ai en permanence dans ma sacoche a été mise à contribution pour moi ou mes amis. En tant que "grand malade", j'ai aussi dans mon sac un pilulier avec l'équivalent d'une journée de tous mes médicaments. L'idée, c'est que si pour une raison ou une autre, je suis coincé quelque part, j'ai toujours les essentiels sur moi.

Alors pourquoi est-ce que je pourrais me retrouver coincé quelque part, me direz-vous? Et bien, je vous propose deux scénarios. Première hypothèse: il arrive parfois à Seattle de se retrouver prise dans des tempêtes de neige ultras violentes qui paralysent la ville. Ne riez pas, une fois une de mes amies s'est retrouvée coincée pendant 10h sur l'autoroute à cause d'une tempête de neige soudaine.  Deuxième hypothèse, il faut rappeler que Seattle est une zone sismique. En 2006, la ville a été frappée par un tremblement de terre de magnitude 6, qui a fermé ma boite pendant une semaine le temps de nettoyer les dégâts. Il est donc parfaitement possible de se retrouver piégé hors de chez soi par un tremblement de terre. Dans ces deux cas, pour moi, pas de problème, j'ai toujours sur moi des médicaments, de quoi tenir le temps de regagner mon domicile, même si cela doit me prendre 24h.

En parlant de tremblement de terre, l'essentiel de notre préparation "catastrophe naturelle" est axée sur ceux-ci. Nous avons des sifflets sur nos portes-clés, nous avons des lampes torches dans l'appartement et dans la voiture, nous avons une caisse dans la voiture avec tout ce qu'il faut pour survivre pendant 72h (eau, nourriture, réchaud, couvertures..), et la même caisse dans notre appartement. Nous avons aussi un filtre à eau dans la voiture, et un stock d'eau d'une semaine pour deux dans l'appartement. Cela vous semble délirant? Lors du typhon Hayan, il y a eu énormément de morts... de soif, parce qu'il n'y avait plus d'eau courante et que les sources d'eau étaient contaminées par les cadavres, etc... Si chaque foyer avait eu un filtre à eau, même un petit filtre à 40$ qui peut alimenter 10  personnes par jour en eau pure, des centaines de morts auraient pu être évitées. S'il y a un tremblement de terre à Seattle et que l'eau courante est coupée pendant quelques jours, nous sommes autonomes en attendant les secours.

A l'heure actuelle, nous ne nous préparons pas à un scénario de type rouge, "effondrement de la civilisation", car avec nos ressources et la maladie, c'est pratiquement impossible. Nous nous informons et c'est déjà pas mal. Nous rêvons aussi de construire un jour une maison écologique, indépendante énergétiquement, mais c'est avant tout parce que le sujet nous passionne tous les deux et non pas parce que nous sommes dans une psychose "fin du mondiste".

Le plus amusant dans tout ceci c'est que toutes ces préparations qui semblent faites pour des événements exceptionnels comme des tremblements de terre  se révèlent utiles dans toutes sortes de petits accidents de la vie au quotidien. Par exemple, ce week-end, en revenant de Palouse Falls, Celia ouvre la fenêtre de la voiture pour prendre une photo du paysage magnifique, et là, la vitre tombe dans la portière. Blam. On se retrouve comme des quiches, à 1h30 de la ville la plus proche, en plein week-end de Thanksgiving, alors que tous les magasins sont fermés (chose extrêmement rare aux US, il faut l'avouer), par 0C, avec une vitre cassée. Galère?

Et ben, par vraiment en fait. Il se trouve que quand nous avons fait de la peinture dans notre appartement, j'ai gardé les feuilles de plastique que nous avions acheté, et que je les ai stockées juste au-dessus de la roue de secours, en me disant que ça pourrait servir de protection un jour. Il se trouve aussi que j'ai du Duct Tape dans mon kit voiture. Et hop, en quelques minutes, nous bricolons une fenêtre de fortune, qui non seulement nous permettra de rentrer chez nous ce soir-là, mais qui nous permettra de rentrer à Seattle le lendemain (5h de route). Ce qui aurait pu être une sacrée galère, surtout vu mon état de santé, ne s'est révélé être rien de plus qu'une aventure.







lundi 2 décembre 2013

Palouse Falls

Ce week-end, nous avons été, comme chaque année, passer quelques jours dans l'est de l'état de Washington pour Thanksgiving.

C'est un endroit que j'adore, très particulier, une espèce de steppe absolument magnifique... C'est aussi l'endroit où sont produits la majorité des vins de l'état. Je referais probablement plusieurs posts cette semaine à ce sujet, mais aujourd'hui, je souhaitais essentiellement vous parler de Palouse Falls.

En fait, dans ce cas précis, une image vaut mieux qu'un long discours, il est impossible de vous décrire ce paysage dantesque... Alors je vous laisse regarder la vidéo :).

petite carte pour situer :)



Palouse Falls




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