Carnets de Seattle: Patchwork d'impressions et d'humeurs d'un Français expatrié puis revenu des Etats-Unis. Depuis mars 2011, ces carnets sont aussi le journal de mon combat contre la leucémie, les séquelles de la greffe de moelle osseuse et le cancer secondaire apparu en Janvier 2024...

lundi 22 juin 2015

La loi des plaines chapitre 9: Interlude

Désolé pour le long silence... J'ai eu quelques semaines assez intenses en terme de boulot, démarches... Je vous tiendrais au courant prochainement de ce qui se passe un peu dans ma vie, de comment je me suis réadapté à la vie en France, au système médical français etc... Et bien sur un petit bilan de santé (qui est bonne, globalement, malgré les douleurs chroniques qui ne me lâchent pas). 

Les braves quittant le camp laissèrent une cinquantaine de personnes derrière eux. Une douzaine d'entre eux étaient des enfants, une vingtaine des guerriers, et le reste étaient des non-combattants et des personnes âgées. "Non-combattants" n'était pas vraiment le mot approprié: la plupart des gens sur Yaghan étaient formés pour lutter contre la menace constante des Morlocks, et les gens des tribus Nʉmʉ l'étaient plus encore car ils vivaient dans les plaines sans murs pour les protéger. Nous dirons seulement que la chasse et le combat n'était tout simplement pas leurs occupations primaires.

Ils commencèrent donc à emballer le camp, une tâche à laquelle ils étaient suprêmement efficace. Leur survie dépendait de leur capacité à devancer les Morlocks dès leur détection. Habituellement, un groupe de braves attirait l'attention des monstres et les éloignait du camp tandis que le reste de la bande s'enfuyait dans la direction opposée. L'incroyable vue de certains braves, le Don qu'ils appelaient les Yeux de l'Aigle, était un atout de taille pour coordonner de telles tactiques. Le fait qu'ils soient beaucoup plus mobiles que les Morlocks grâce à leurs formidables capacités équestres aidait également, bien sûr.

Cela restait un style de vie rude et dangereux, qui dépendait plus que jamais de la capacité de chacun à travailler ensemble. Les tipis étaient faciles à démonter et leurs longues perches furent rapidement chargées sur de robustes petits chariots tirés par de lourds chevaux de trait. Les chevaux étaient la fierté des Nʉmʉ. La capacité télépathique de certaines de leurs montures améliorait leurs capacités déjà formidables pour les porter à un niveau surnaturel, homme et cheval agissant ensemble comme s'ils ne faisaient qu'un. Il y avait plus de cinq chevaux pour chaque être humain, tous élevés à des fins diverses. Certains étaient de lents animaux de trait, certains étaient très rapides et endurants, certains étaient de grands et fiers coursiers qui portaient leurs cavaliers sans peur au coeur de la bataille. L'élevage de tant d'animaux était une tâche ardue, facilitée par l'aide de ceux dotés de Dons, ainsi que de celle de nombreux gigantesques molosses, également télépathes, qui étaient les autres compagnons du peuple des plaines.

Très vite, tout fût emballé dans des paniers tissés et prêt à charger sur des chevaux de rechange à la moindre alerte. Ils éteignirent les feux, remplir à ras bord les chariots et les attelèrent. Puis commença la pire partie de la vie des Nʉmʉ. L'attente.

Tout le monde savait que dans tout ce qui concernait les morlocks, la mort n'était jamais très loin. Ils avaient tous perdu quelqu'un, un parent, un ami, un membre de la tribu ou un cheval à cause du fléau de l'humanité. Même avec la meilleure organisation, même avec les meilleurs chevaux, les meilleures lances et les meilleures guerriers de leur côté, rien n'était certain. Les Morlocks étaient une sous-espèce changeante, ils évoluaient en permanence, et devenaient constamment plus puissants. A chaque confrontation, il y avait une nouvelle variation, une nouvelle mutation terrifiante. Vous ne pouviez jamais complètement être prêt et la seule solution était d'être aussi adaptable que possible, ce qui était loin d'être facile quand la peur tenaillait vos entrailles.

Une jeune femme tira une petite flûte en bois d'un sac et commença à jouer doucement. Les tambours avaient été emballés, et comme faire trop de bruit n'était probablement pas une idée brillante, les gens qui se joignaient à elle frappaient avec les paumes de leur main contre leur poitrine ou leurs cuisses. Manoeka, une femme âgée, commença à chanter lentement un air antique, la chanson de lune. Peut-être qu'elle pourrait attirer Ebimʉa, la lune bleue qui était une présence bienveillante dans le ciel et un symbole de bonne chance, pour remplacer Epimʉa, qui était connue sous le nom de Rouille à Gond, et qui était un bien mauvais présage. La douce chanson, même si elle n'était pas jouée fort, réchauffait le coeur de tous les humains présents. À leur tour, leurs compagnons à quatre pattes dotés du Don se détendirent, ce qui contribua à calmer les autres animaux n'ayant pas leur capacités. La voix de la chanteuse était comme une respiration collective, une profonde respiration qui desserra l'emprise de la peur sur leurs cœurs.

Patiemment, ils attendirent.

lundi 8 juin 2015

La loi des plaines, chapitre 8: L'équipe de sauvetage

Pisunii rêvait un rêve de cheval, elle galopait joyeusement dans la rosée du matin avec sa cavalière Tosawi ["Couteau d'argent"] sur le dos, quand il commença soudain à s'estomper, à devenir autre chose. Elle vit son petit frère, le jeune et joyeux Wakaree, courir vers elle. Alors qu'il s'approchait, la rosée s'évapora, l'herbe se dessécha, le ciel s'assombrit et le vent se mit à hurler une chanson d'angoisse, de douleur et de désespoir. Elle ralentit son allure, d'un galop à un trot, à un pas lent. Wakaree la rattrapa, ses flancs se soulevant péniblement, sa robe luisant de sueur. Ses yeux et ses narines étaient écarquillées et il dégageait une odeur de terreur pure. "A l'aide!" cria-t-il à plusieurs reprises, encore et encore.
Sa voix devenait de plus en plus forte et bientôt Pisunii réalisa que ce n'était pas un rêve. Wakaree l'appelait d'au-delà du monde des rêves. Elle se réveilla.

C'était lae milieu de la nuit. Seule la lueur sanguine de la lune éclairait le camp. Elle frissonna. Cette lune la mettait mal à l'aise. Sa queue commença à se balancer nerveusement de gauche à droite.
Faisant attention à ne pas marcher sur les humains dormant allongés dans l'herbe tendre, elle se dirigea vers sa sœur et cavalière, Tosawi, et se mit à la pousser du museau. Les habitants de la plaine dormaient toujours légèrement et la jeune brave ne faisait pas exception. Elle se réveilla instantanément, sa main se portant instinctivement au couteau qui ne la quittait jamais. Réalisant que c'était son partenaire, elle se détendit instantanément et caressa son doux museau.

"Hey, Pisunii, de quoi as-tu peur ma chérie?" dit-elle doucement.

Le cheval tourna ses oreilles vers son amie et commença à projeter les images de son rêve vers l'esprit de la jeune chasseresse. Celle-ci frissonna quand elle vit et ressentit l'angoisse émanant du message de Wakaree. Jetant de coté les fourrures dans lesquelles elle dormait, elle se leva lestement et jeta le second cri d'alarme.
Les Nʉmʉ avaient imaginé différentes façons de mettre toute une tribu en mouvement rapidement. L'un des cris d'alarme signifiait «L'ennemi est à nos portes, prenez vos armes et défendez vos vies". Un autre, celui que Tosawi hurlait à ce moment précis, signifiait «Tout le monde doit se réveiller, commencer à emballer ses possessions et se tenir prêt en attendant les ordres." Un dernier signifiait tout simplement "Rassemblez tout, nous quittons le camp dès que possible." Chaque Nʉmʉ connaissait la signification de chaque cri et savait exactement ce qu'il avait à faire. La tribu commença à se réveiller, hébétés de sommeil et encore confus, mais une vie d'habitude pris la relève et ils se mirent tous à leur tâche aussi vite qu'ils le pouvaient.
C'était un spectacle étrange, d'une certaine manière: le camp bourdonnait d'activité, mais ils essayaient tous de rester aussi silencieux que possible. On ne savait jamais.

Les femmes et les hommes des tribus étaient complètement égaux. Le Devoir de chacun envers le groupe était principalement basé sur leurs capacités et leurs talents particuliers. Bien sûr, il y avait plus d'hommes que de femmes guerrières car ils étaient généralement plus fort physiquement, mais ce n'était pas la règle et les Dons avait égalisé le terrain de jeu considérablement. La force physique pure était un détail quand on était en mesure de créer de puissants coups de vent ou de contrôler où la foudre tombait pendant un orage.

Les guerriers, hommes et femmes, se dirigèrent vers Kanaretah ["Chevauche les nuages»], la Chef de Guerre de la bande, tandis que les autres empaquetaient le camp. Le Chef de Paix, un homme énorme nommé Boyahwahtoyahe ["Montagne de Fer"] rejoint également les guerriers: il devait savoir si la tribu allait quitter les lieux ou rester en place, car il était le responsable quand les guerriers étaient partis. Kanaretah était une femme d'âge moyen qui était douée de la capacité de prévoir le temps, de trouver une source d'eau, et de condenser l'humidité présente dans l'air. Elle était une cavalière fantastique et son cheval Neraquassi ["Cheval Doré"], un magnifique alezan, était le plus rapide de la harde. Elle était également une archère accomplie ainsi qu'une tacticienne de talent qui restait calme dans les pires circonstances, mais c'était son Don qui la rendait particulièrement redoutable: elle pouvait remplir les poumons des Morlocks d'eau et de les noyer à l'air libre, ou absorber l'humidité de leurs yeux et les aveugler. Outre Tabbaquena le chaman, personne n'était aussi Doué qu'elle, ce qui était aussi pourquoi elle avait été choisie comme chef de guerre.
Elle s'était levée avec le cri de Tosawi et elle était déjà habillée. Elle attachait ses longs cheveux noirs corbeau derrière son dos alors que les guerriers se rassemblaient autour d'elle.

La vingtaine de braves forma rapidement un cercle. Quand ils ont furent tous là, elle salua Towasi. "Qu'est ce qui se passe, explique-toi, vite!" On pouvait deviner qu'elle avait normalement une voix douce, mais à cet instant, elle était aussi dur que l'acier.
"Pisunii a été contactée par Wakaree. Elle m'a montré les images qu'il lui a envoyé, il était terriblement effrayé et Yahneequena était affalé sur sa croupe, immobile. Je ne sais pas ce qui se passe, mais quelque chose ne va vraiment pas".
"Pourquoi est-il seul, par tous les esprits!" dit Kanaretah, et il y avait de la glace dans sa voix.
"Pahiitʉ-Saari est malade", dit une voix derrière le cercle de guerriers. C'était la mère de Yahnee.
"Et personne ne pouvait aller avec lui?" demanda Kanaretah avec colère.
Chaque personne présente se mit tout à coup à étudier ses pieds intensément. Les Nʉmʉ assumaient leurs erreurs: les actes de chacun étaient la responsabilité de tous et personne ne songeât à souligner que Yahnee était sorti seul de son propre chef. En outre, ils savaient tous qu'une fois que cet incident serait terminé, Kanaretah leur ferait payer leur manque de discipline par d'éprouvantes séances de manoeuvre.
Enfin, quelqu'un osa parler.
"Des pʉetʉyai autour d'eux?" demanda Boyahwahtoyahe avec sa belle voix de basse.
"Je ne pense pas. Wakaree les aurait probablement montré à Pisunii" répondit Tosawi. "Il essayait de ramener Yahnee sur son dos, il me semble. Aucun signe de blessure ou de quoi que ce soit, pas de sang."
"Haa Haa", acquiesça le chef de Paix. Les braves de la bande commencèrent à murmurer, chacun d'eux se demandant ce qui avait pu arriver pour que Wakaree envoie un appel à l'aide aussi désespéré.
Kanaretah était aussi le chef de guerre parce qu'elle pouvait prendre des décisions difficiles avec des informations incomplètes très rapidement.
«Écoutez tous!", dit-elle, sa voix assez forte pour être entendue par tous les guerriers autour d'elle.
"Tout le monde continue à empaqueter le camp. Je veux que tout soit prêt pour que nous partions en direction de Gond, c'est la ville fortifiée la plus proche." Elle s'arrêta un instant, regardant les visages sévères autour d'elle, s'assurant qu'elle avait bien été comprise. Les Nʉmʉ n'aimaient pas demander l'asile aux les villes fortifiées, même si c'était leur droit ancestral, ils n'avaient que du mépris pour leurs veules habitants. Ceci étant, ils étaient des survivants avant tout et fuir signifiait que vous pouviez combattre un autre jour, ce qui était une bonne chose.
«Je veux cinq braves avec moi. Nous allons trouver Yahneequena et le ramener. Si rien d'autre ne cloche, nous déballerons le camp. Dans le doute, nous partirons. Si quelque chose va mal, nous fuyons à Gond."
"Haa, Haa" dirent-ils tous à l'unisson.
"Boyahwahtoyahe, si tu vois quelque chose d'inhabituel, vous fuyez, bien compris?"
Il hocha de la tête pour marquer son assentiment.
"Pour l'équipe de sauvetage, je veux que vous preniez chacun un cheval de rechange. Towasi, tu en prends un autre pour Yahneequena, Wakaree est probablement épuisé. Tabbaquena, je déteste te mettre en danger, mais si Yahneequena est blessé, nous pourrions avoir besoin de toi. "
Le chaman s'avança. «Je pense que c'est sage. Je vais me préparer", dit-il , puis il partit vers son tipi pour recueillir les herbes et potions dont il avait besoin. Il se mit à aboyer des instructions aux jeunes Nʉmʉs qui étaient chargés de l'emballage de ses affaires.
"Très bien. Tout est réglé. Chevauchons, guerriers", cria Kanaretah.
Le cri de guerre assourdissant de la bande lui répondit, puis ils se dispersèrent, chacun s'affairant à sa tâche.

Quelques instants plus tard, l'équipe de secours était prête et chevauchait hors du camp.

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